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Hypermétrope, presbyte et légèrement astigmate : quelle correction serait la meilleure ?

Votre question :

Je suis une femme de 45 ans. Je suis hypermétrope (environ +1.25) et presbyte (environ un autre +1.50) et très légèrement astigmate. Mes deux yeux nécessitent pratiquement les mêmes corrections. Mon problème est que, lorsque je me fais prescrire des lunettes (maintenant à foyers progressifs), ma vision me semble corrigée au début, mais après 1 mois ou deux, mes maux de tête recommencent car on dirait que ma vision s’affaiblit. Habituellement, je consulte tous les 2 ans et une correction d’environ +1.50 est ajoutée à chaque fois.
Comme mes maux de tête sont maintenant quotidiens et que mon prochain examen devrait avoir lieu dans environ 6 mois, je me demandais si une chirurgie au laser pouvait être une bonne option pour corriger ma vue à long terme. Si c’est le cas, quel type de correction pourrait être approprié (et S.V.P., j’aimerais éviter la monovision) ?
Merci à d’avance de répondre à ma question.

Notre réponse :

D’un point de vue fonctionnel, l’hypermétropie et la presbytie ne font pas « bon ménage »; l’arrivée de la presbytie (vers la quarantaine) provoque souvent une impression de baisse globale de la vision chez l’hypermétrope. Dans votre cas, l’hypermétropie est faible, et elle n’a probablement pas été très gênante dans le passé (sauf travail intense et prolongé en vision de près, source de « fatigue visuelle »). En effet, en « accommodant », vous pouviez corriger ce défaut en faisant une « mise au point », de manière automatique, sans en avoir véritablement conscience. L’hypermétrope modéré utilise ce mécanisme normalement réservé pour voir de près (l’accommodation) pour améliorer sa vision de loin. Or, la presbytie correspond justement à une réduction progressive de l’amplitude de l’accommodation, ce qui explique que ce mécanisme de compensation devienne de moins en moins efficace. C’est peut être pour cette raison que vous ressentez une baisse progressive de la vision de loin, au bout d’un certain temps. C’est aussi pour cela que les hypermétropes ont parfois la sensation de devenir presbyte assez tôt au cours de leur existence, parfois dès 35 ans. Un examen de la réfraction sous collyres cycloplégiques (gouttes qui empêchent tout effort d’accommodation) permet souvent de démasquer l’hypermétropie dite « latente ». Ces collyres bloquent temporairement le mécanisme de compensation accommodative.
(pour en savoir plus, je vous conseille cette page: https://www.gatinel.com/chirurgie-refractive/hypermetropie-et-presbytie/)

Si l’hypermétropie et la presbytie concourent à réduire la vision des quadragénaires, le bon côté de la médaille est que la correction de l’hypermétropie (et de l’astigmatisme hypermétropique associé) a un effet synergique bénéfique sur la presbytie. Autrement dit, en corrigeant simplement votre hypermétropie (en LASIK, car vous êtes trop jeune et pas assez hypermétrope pour vous envisager de manière éthique une chirurgie du cristallin avec implants multifocaux), une amélioration de la vision de près serait également induite de manière « automatique » (vous pourriez lire sans lunettes des caractères plus petits que ceux que vous lisez aujourd’hui sans lunettes), mais malheureusement pas suffisante pour contrer l’évolution de la presbytie, ….qui est débutante et va s’accentuer au cours de la décennie à venir !

On peut cependant accentuer certaines particularités de la correction de l’hypermétropie (effet de multifocalité) pour obtenir une amélioration plus importante de la vision de près que si l’on se bornait à ne corriger que la vision de loin. L’effet de multifocalité est lié au profil qu’adopte naturellement la cornée après chiurgie LASIK de l’hypermétropie: en faisant bomber le centre de la cornée, on induit de manière inévitable un aplatissement plus périphérique, et ce profil résulte en une variation de puissance optique, qui définit justement la multifocalité. Cependant, quelle que soit la technique employée en chirurgie de la presbytie, toute amélioration de la vision de près (augmentation de la multifocalité, surcorrection qui rend l’oeil myope et donc capable de voir nettement de près) se fait au prix d’une certaine dégradation de la vision de loin. Cette dégradation n’est pas forcément quantifiable en terme de dixièmes, mais peut se traduire par une réduction de la sensibilité aux contrastes.

C’est pour ces raisons que des techniques de correction conjointe de l’hypermétropie et de la presbytie utilisent très souvent une modulation de la correction entre l’oeil droit et l’oeil gauche (l’oeil dominant est corrigé pour la vision de loin, l’autre – non dominant – est corrigé avec une technique accentuant la multifocalité pour accroître l’acuité de près: ceci induit une moindre performance en vision de loin de ce côté, mais qui n’est pas assez franche pour être gênante).

Ce type de correction différentielle entre oeil droit et gauche n’est pas à proprement parler de la monovision, qui implique par définition une différence de correction franche entre les deux yeux. En chirurgie LASIK pour l’hypermétrope presbyte, on « module » plutôt légèrement la correction et son caractère multifocal entre les deux yeux de manière à ce qu’en vision binoculaire (les deux yeux ouverts, ce qui correspond aux conditions normales d’observation), le patient ne ressente pas de différence évidente entre la vision de chaque oeil.

Cette approche est aussi parfois désignée sous le terme de « Presby LASIK », terme qui regroupe un ensemble de stratégies utilisées pour corriger conjointement un défaut optique éventuel de loin, et donner de la vision de près sans correction en lunettes. Les techniques de « Presby LASIK » sont également commercialisées par certains fabricants de laser sous des appellations spécifiques (ex: Supracor, Customized Q, Blended vision, Presby-ond etc.). S’il existe des différences subtiles entre ces approches (sans parler de leurs aspects « marketing »), elles ont en commun l’induction d’une multifocalité variable, qui repose sur une accentuation de l’asphéricité du profil cornéen, qui est plus « facile » à induire chez les hypermétropes que chez les myopes (ainsi, le presby LASIK est une technique généralement peu usitée chez les myopes, au contraire de la vraie monovision, car il est difficile de conjuguer multifocalité et correction de la myopie chez le myope presbyte).
Ces explications peuvent vous paraître un peu compliquées: la correction de la presbytie repose sur des concepts à la fois théoriques et empiriques qui ne sont pas toujours bien codifiés, et qui permettent justement à certains chirurgiens et fabricants de profiter de la « confusion » pour proposer des méthodes de corrections prétendument spécifiques ou innovantes…il n’en demeure pas moins que dans tous les cas, pour corriger la presbytie, il est préférable d’être un peu hypermétrope, et je vous conseille ainsi d’effectuer un bilan orienté dans un centre spécialisé pour vérifier la possibilité de bénéficier d’une correction au laser excimer (LASIK).

2 réponses à “Hypermétrope, presbyte et légèrement astigmate : quelle correction serait la meilleure ?”

  1. Dr Damien Gatinel dit :

    L’oeil droit présente un astigmatisme mixte et une presbytie, et l’oeil gauche présente un astigmatisme myopique et une presbytie;

  2. Nicolas BALLAND dit :

    Bonjour j’a une ordonnance de prescription d’un ophtalmologue qui est:

    OD: +0,5 (-0,75) 20 degrés avec ADD 2.00
    OG: 0 (-0,75) 100 degrés avec ADD 2.00

    Confirmez moi le mais si j’ai bien compris à la vue de ces valeurs je suis Hypermétrope, Astigmate et Presbyte?

    Vous remerciant par avance de votre réponse,

    Cordialement

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